lundi 18 novembre 2019

Petit traité théologique sur l'Homosexualité


                                                 Tous les discours sont usés,
l’homme ne peut rien dire
Qohelet, 1,8

Petit traité théologique sur l'Homosexualité

0.    Introduction

            Ce travail est le résultat d'une réflexion qui m’habite depuis quelques temps et qui  devient urgente après les récents débats à l'intérieur des différentes Églises. Ethicien·ne·s, systématicien·ne·s, biblistes, pasteur·e·s prennent tous les jours les positions les plus disparates face à cette question. Cette contribution s'inscrit dans une démarche spécifique qui veut proposer une méthode rigoureuse pour maîtriser les tenants et les aboutissants du débat.

1.    L'homosexualité comme structure psychoaffective spécifique

Nous acceptons les récents résultats de la médecine d'aujourd'hui, des sociétés psychiatriques et de l’OMS qui définissent l’homosexualité non comme une maladie [1] ni comme une névrose en soi mais comme une structure psychoaffective spécifique.  Cette définition a le mérite de ne pas donner un jugement médical qui est aujourd'hui controversé. Comme le reconnaît aussi le catéchisme de l'église catholique[2], "sa genèse psychique reste largement inexpliquée". Définir l'homosexualité comme structure psychoaffective permet de traiter le sujet de façon la plus neutre possible. Elle permet aussi de pouvoir décider librement si cette structure psychoaffective présente ou pas des déficiences graves. 

2.    La position de l'Eglise Catholique

            Nous proposons de commencer le tour de la question par la position théologique du catéchisme de l’Église Catholique. Cette position nous semble éclairer un aspect important du problème. Cette position reconnaît que la genèse psychique de l'homosexualité reste largement inexpliquée et que les homosexuels "ne choisissent pas leur condition". Nous comprenons par là que l’Église Catholique ne veut pas porter de jugement médical ou théologique sur l'homosexualité en tant que structure psychoaffective. Le point central de son argumentation est la perception théologique des actes physiques homosexuels. En effet, "ils ferment l'acte sexuel au don de la vie. Ils ne procèdent pas d'une complémentarité affective et sexuelle véritable".
            Cette position est cohérente avec l'ensemble de la doctrine sexuelle de l’Église romaine. Pour elle le seul acte sexuel licite est celui à l'intérieure du mariage et ouvert à la procréation, au don de la vie. L'acte homosexuel reçoit donc la même désapprobation que l'acte hétérosexuel hors mariage, avec en plus la fermeture totale et "contre nature" au don de la vie et à la complémentarité sexuelle. Le catéchisme catholique ne pousse pas l'homosexuel à la guérison, mais "à unir au sacrifice de la Croix du Seigneur les difficultés qu'elles peuvent rencontrer du fait de leur condition. Les personnes homosexuelles sont appelées à la chasteté. Par les vertus de la maîtrise, […] par la prière et la grâce sacramentelle, elles peuvent et doivent se rapprocher[…] de la perfection chrétienne". La même discipline est demandée aux célibataires (prêtres ou laïcs) et aux fiancés, en tout cas jusqu'au mariage. Il nous semble important remarquer que la condition psychoaffective de l'homosexuel est acceptée et non jugée.

L’Église Catholique romaine impose une interdiction toute formelle, à partir des lois restrictives contenues dans la Torah. En ce sens l'interdiction des actes homosexuels est liée à une normative biblique fondamentale. L’Église catholique a un rapport très étroit avec le normatif et n'a aucune peine à imposer des interdictions formelles. La théologie catholique, d'ailleurs, se fonde sur une triple référence : la Loi naturelle, la Tradition et la Bible. Elle peut relativiser certains propos bibliques à la lumière de la Tradition ou de la Loi Naturelle. Dans cette perspective l'homosexualité est condamnée par la "Loi Naturelle", telle que comprise par l’Église, par la Tradition et par certaines normatives bibliques. C’est pour cela qu’elle peut condamner l’acte homosexuel à partir d’une loi spécifique de la Torah avec comme appuis la Tradition et la Loi Naturelle. Il nous semble que certaines positions à l'intérieur du protestantisme traitent la problématique d'un point de vue tout à fait différent.

3.    Les positions protestantes

La plupart des positions protestantes conservatrices et de tendance "évangélique" concernant l'homosexualité proposent à l'homosexuel une démarche de guérison. Cela signifie, à notre avis, que ces prises de positions semblent porter un jugement théologique non seulement sur les actes homosexuels, mais aussi sur la structure psychoaffective. Cette dernière relèverait d'une "maladie spirituelle", d'une déficience affective qui appelle à la guérison, au combat spirituel. D'ailleurs, si l'on suit des témoignages de "guérison", nous voyons qu'il est promis à l'homosexuel la possibilité de changer de structure psychoaffective, promesse qui engendre souvent des drames et des crises de conscience très lourds à supporter. Pourquoi le protestantisme ne se limite-t-il pas à interdire les actes homosexuels à partir d'une normative biblique?

a)     L'absolutisme référentiel de la Bible

Pour le protestant la référence unique et absolue est la Bible. Cet ensemble de livres est la source unique d'une possible interprétation du projet divin. Le protestantisme ne pourrait pas se contenter d'une interdiction formelle. Le protestant, même traditionaliste et conservateur, sait qu'il doit aller plus en profondeur. En effet le formalisme pousse le croyant à des paradoxes intenables. Si l'interdiction de l'acte homosexuel repose uniquement sur l'interdiction du Lévitique, nous devrions prendre aussi au sérieux les autres interdictions, passibles de peine de mort, comme le fait de semer deux semences différentes dans un même champs ou porter des vêtements avec des fibres végétales différentes. Si nous ne voulons pas tomber dans le ridicule ou dans la contradiction,  nous serions obligés de relativiser les normes bibliques et donc aussi la condamnation de l'homosexualité. 

b)    La libération sexuelle

Une autre difficulté du protestantisme survient à partir de la libération sexuelle mise en place depuis les origines de la Réforme. C'est-à-dire que pour le protestantisme, le plaisir de l'acte sexuel à l'intérieur du mariage n'est plus étroitement lié au don de la vie. Si pour le catholique d'aujourd'hui il est admis et même conseillé d'avoir du plaisir en faisant l'amour, leur plaisir ne doit pas être prioritaire devant le don de la vie. De ça découle l'interdiction à tout empêchement total et artificiel (contre nature) à la procréation. Le protestant conçoit une vie affective et sexuelle en dehors de la procréation. Certains courants protestants de notre époque  admettent la possibilité d'avoir des relations sexuelles à l'intérieur d'un projet d'amour qui aboutira ou qui n'aboutira pas au mariage. A partir de ces considérations, il devient réaliste de libérer la sexualité de toute contrainte, hormis celle de l'amour évangélique, du respect de l'autre et de soi même. Bref, on pourrait admettre qu'une sexualité fidèle et respectueuse puisse être permise même à des personnes à tendance psychoaffective homosexuelle. Comment intégrer alors les interdictions formelles du Lévitique et de Paul ? Faut-il admettre que notre réflexion au sein du protestantisme est plus évoluée que celle de Paul ou du Lévitique ? Devons-nous admettre la relativité des écrits bibliques ? D'ailleurs, cette relativité n'est-elle pas enseignée dans les Facultés de Théologie à travers les méthodes d'approche critiques ?

c)     Les propositions herméneutiques

C'est à partir de ces contrastes que des théologiens sentent le besoin d'affirmer l'absolu référentiel qu’est la Bible et en même temps d'échapper au formalisme choisi par les catholiques ou les fondamentalistes.

C'est dans ce cadre que nous plaçons certaines entreprises herméneutiques comme celle des pasteurs Burgat et Pella, ou d’Eric Fuchs ou encore de Pierre Bühler. Ce dernier, d'ailleurs, essait de proposer une remarquable ouverture à l'homosexualité, et en même temps de sauver la Bible et son autorité[3].

Ces entreprises essayent de chercher une prétendue unité anthropologique de la Bible en mettant ensemble des documents de la Genèse, d'autres du Lévitique, et ainsi de suite jusqu'à Paul. Il y a cependant deux positions : une réactionnaire et l'autre plus progressiste. Cette dernière (assumée par Bühler et aussi Denis Müller dans ces interventions publiques) tente justement de concilier l'autorité référentielle de la Bible avec une ouverture à la condition homosexuelle. Après avoir identifié une anthropologie biblique qui affirme la primauté ontologique de l'altérité sexuelle homme/femme à travers le récit de la création, ces positions progressistes essayent de relativiser la forte normativité de l'hétérosexualité et ainsi accepter, à de précises conditions, l'homosexualité. Les positions réactionnaires, par contre, appuient fortement sur la normativité fondamentale de l'hétérosexualité. Elles essayent de démontrer que l'interdiction de l'homosexualité ne repose pas sur une simple interdiction formelle, mais d'une subversion sexuelle qui est au cœur du rapport même entre Dieu et l'homme. Cette entreprise nous semble quand même dictée d'un postulat de départ aprioritique : la structure psychoaffective homosexuelle relèverait d'une déficience et d'une maladie spirituelle appelée à la guérison. Pour prouver la vérité de ce postulat, ces théologiens en cherchent à tout prix la preuve dans une prétendue anthropologie biblique[4]. 

4.    L'approche critique de la recherche biblique

            Nous sommes obligés de mettre en question les perspectives herméneutiques citées plus haut. Au risque d'être banales nous rappelons l'étymologie du mot "Bible", -ta biblia- "les livres". Les Juifs l'appellent Torah, Prophètes et Autres Écrits. Ces appellations montrent bien qu'il ne s'agit pas d'une œuvre littéraire unitaire, mais d'un ensemble hétéroclite de livres. La plus part de ces livres n’ont pas connu non plus une rédaction unitaire, mais sont le résultat de plusieurs strates littéraires, qui ont chacune une idéologie bien précise et parfois contradictoire. Ces couches sont unifiées par une particulière perspective rédactionnelle. Il s'agit donc d'une bibliothèque ancienne, rédigée avec des procédés narratifs différents d'aujourd'hui. Nous devons donc nous approcher de cet ensemble de la manière la plus précise et prudente possible. Nous avons besoin d'outils précis et rigoureux. Nous avons besoin de plusieurs angles d'attaque, à partir de l'étude des formes littéraires, des structures narratives. Nous avons besoin d’étudier ces textes à l’aide des méthodes comparatives et d'approches historiques qui les plongent dans le contexte littéraire de l’époque de production ou de rédaction. Nous devons encore les confronter aux dernières découvertes archéologiques, avec les productions littéraires de l’époque. Nous devons différencier le concept de « source », « document », « rédaction ». Nous devons encore préciser et définir les genres littéraires, les différencier entre eux. Il est impératif de procéder par modèles et par hypothèses, qui sont des outils, parfois provisoires, pour mieux étudier le texte, comprendre l'intention des auteurs, leur cadre de vie. Nous devons accepter le fait que la véritable interprétation est probablement impossible à atteindre et que nous pouvons seulement formuler des hypothèses vraisemblables, appelées à être dépassées ou améliorées. Acceptons de devoir procéder comme la science, par observation, analyse, calcul, hypothèse, modèle, vérification, falsification, conclusions. Acceptons aussi que nous devons procéder par essai et erreur. Les livres de la physique quantique, par exemple, vieux de 60 ans, et même ceux d'Einstein, sont dépassés pour le physicien d'aujourd'hui. De la même manière certaines interprétations bibliques ne sont plus proposables à la lumière des nouvelles connaissances.

            Ces méthodes sont exigeantes. Nous pensons cependant que c’est la meilleure manière de nous rapprocher du texte biblique. Ne pas accepter l'importance d'une étude rigoureuse des textes bibliques signifie postuler que ces derniers sont accessibles par n'importe quelle lecture à l’aide de la simple assistance du Saint Esprit. A partir de cette affirmation nous pouvons soit fermer les facultés de Théologie ou les transformer en écoles théologiques pour évangéliques (glissement qui n’est d’ailleurs pas si fantaisiste que ça). D’ailleurs, si nous avions dû compter sur l'assistance du Saint Esprit, nous croirions encore que la Torah a été écrite par Moïse et que Marc est le résumé de Matthieu ou que le Soleil tourne autour de la Terre.
Certes, nous sommes conscients que nous prenons un postulat de base assez précis : nous n'avons pas le droit d'aller au de-là de ce que le texte voulait dire à l'époque dans laquelle il a été produit. Cela ne signifie pas qu'il puisse être toujours possible de comprendre totalement le sens véritable du texte, mais cela implique tout simplement que nous devons nous approcher avec prudence, par hypothèses et modèles falsifiables, renonçant à vouloir détenir la vérité. Cela signifie que les textes bibliques n’ont plus aucun intérêt pour nous aujourd’hui ? L'homme est à notre avis toujours concerné par les problématiques ou par les prises de positions des textes anciens et nous pouvons toujours apprendre d'eux. Beaucoup de gens et parmi les plus brillants, retravaillent les positions éthiques, philosophiques ou scientifiques des auteurs classiques. Personnes n'aurait à l'idée de jeter Cicéron à la poubelle sous prétexte que ses écrits datent d'il y a 2000 ans. De même, les textes bibliques nous interpellent, nous aussi, femmes te hommes et du XXIème siècle. Ils nous interpellent dans ce que nous avons de plus précieux : la recherche d'un sens pour nous aujourd'hui, en d'autres mots : la recherche de Dieu. Mais cette recherche ne peut être réaliste et intellectuellement honnête que si elle respecte l'intention réelle du texte, ou, du moins, la complexité du débat à l'intérieur d'une bibliothèque telle que celle de "Les Livres". Thomas d'Aquin disait d’ailleurs que les fausses opinions sur la réalité entraînent des fausses opinions sur Dieu. Il est de notre devoir de théologiens de traiter avec prudence de l'interprétation des textes bibliques et de refuser tout dogmatisme ou opinion bornée, au péril de nous rendre peu crédibles face à un monde dominé (à notre sens heureusement) par les postulats de la science. A notre avis, il est aussi de notre devoir de jeter dans l'arène du débat public les positions, parfois différentes et diversifiées, des livres bibliques, sans faire appel au Deus ex machina de la Vérité Objective, du Projet divin et autres hypothèses hautement spéculatives.

L'application de telles exigences dans l'étude biblique autour de la problématique de l'homosexualité nous pousse à formuler que l'interprétation la plus économique est de reconnaître que certaines normatives bibliques interdisent les actes homosexuels en raison de leur caractère contre nature et fermés au don de la vie. C'est l'interprétation la plus économique et la plus proche des textes. Les homosexuels, en prenant plaisir dans leur activité sexuelle, mettaient en danger la survie du peuple, survie liée à la fécondité.

  1. Le problème de l'homosexualité comme problème strictement sexuel[5]

            Si nous excluons donc toute interprétation biblique invérifiable et que nous nous concentrons sur le sens assez vraisemblable des textes qui interdisent l'aventure homosexuelle, nous ne pouvons que remarquer que c'est l'acte sexuel qui pose problème. Le concept même de structure psycho-affective est étranger à cet horizon culturel. Tout au plus, nous pouvons rapprocher à notre concept moderne d'homosexualité, celui d'Amicitia, présent chez les auteurs antiques. Paul lui même ne prend en compte que l'aspect sexuel, l'insérant sur une conception archaïque de ce qui est "naturel" ou "contre nature". Pour l'Apôtre, un tel acte ne pouvait donc qu'être abject. Il était interdit par la Torah, il entraîne les hommes dans une passion charnelle qui met en premier plan la jouissance sans aucune possibilité de procréation. Si pour Paul, qui, rappelons-le, attendait le retour du Christ pour les jours à venir, le mariage était un remède contre l'incontinence de la passion charnelle, à plus grande raison il ne pouvait que concevoir comme dépravés ceux qui ne voulaient pas se marier tout en voulant vivre leur passion en dehors de toute règle. Ces gens ne pouvaient qu'être des idolâtres païens, incapables d'une quelconque discipline spirituelle, de plus à court terme (le Christ revient!). Pouvons-nous aujourd’hui, en toute conscience, tenir un pareil discours et avancer les mêmes arguments ? Pouvons nous, en toute conscience, affirmer que les homosexuels doivent lutter contre leur propre identité, se renier pour guérir de leur prétendu mauvais penchant ? Ou pouvons nous, en toute conscience leur dire que, à cause de leur condition, qu’ils n'ont pas choisi, leur est interdite toute jouissance sexuelle? Quel Dieu annonçons nous ainsi ? Pouvons-nous en toute conscience mettre de tels fardeaux sur les épaules de ces gens ? Pour notre part, notre réponse est: non !

  1. Conclusions
     
            La théologie biblique moderne nous enseigne et autorise à relativiser les textes bibliques et à être autonomes dans les réflexions éthiques. Les propos et les positions, souvent multiples, des textes bibliques ne peuvent être pris à la lettre sine grano salis. Nous privilégions certes les interprétations les plus littérales possibles, mais nous refusons de nous embourber dans des contradictions à la manière fondamentaliste ou de nous fatiguer dans des pirouettes herméneutiques à la manière de certaines théologies confessionnelles, conservatrices ou progressistes. Nous considérons que l'héritage de la Réforme le plus intéressant pour l'homme d'aujourd'hui avec ses problèmes complexes n'est pas l'approche littéraliste à la mode évangélique ou traditionaliste, mais l'approche critique qui rends compte du dialogue interne même des textes et l'évolution de ceux-ci. Cette approche nous autorise à admettre que, parfois, notre réflexion sur des problèmes qui touchent l'humain est plus avancée que la réflexion de certains textes bibliques. Nous acceptons sans problème la multiplicité des approches anthropologiques témoignées par les écrits bibliques, multiplicité qui nous interroge sur le sens à donner à notre vie. Cette multiplicité nous encourage d'ailleurs à parcourir la route de l'approche critique, intelligente, brillante, et à refuser les lectures fondamentalistes, piétistes, dogmatiques de la Bible. Nous affirmons que Dieu est dans la multiplicité du réel (tension de l’infini potentiel vers l’infini) et non dans le dogmatisme d'une seule Vérité métaphysique.
En conséquence de ces énoncés, nous ne pouvons traiter de l'homosexualité que d'un point de vue expérimental. Les observations des comportements et des structures affectives des homosexuels tendent à relever que leur structure psychoaffective n'est pas guérissable à travers une quelconque discipline, même spirituelle. Il est assez clair que les homosexuel·e·s non seulement ne choisissent pas leur condition, mais il ne sont pas en mesure de la changer. Deux personnes confrontées à une même difficulté existentielle ne développent pas la même structure psychoaffective. Il est vrai que, d'un point de vue de la survie de l'espèce, le comportement homosexuel peut paraître "anormal", car "stérile". Il semble néanmoins naturel, car il est présent aussi chez d’autres mammifères, et surtout aussi chez les primates. Nous pourrions continuer avec les observations, en intégrant les récits de vie des homosexuels, mais tel n'est pas le sujet de ce petit traité.
Nous mettons donc au centre du débat ecclésiastique le postulat que toute réflexion sur l'homosexualité en tant que condition « réelle » d’une partie considérable de l’humanité et en tant que structure psychoaffective spécifique doit se baser sur les observations, l'écoute attentive des situations de vie des homosexuels, sans prise de positions dogmatiques préalables. Il nous semble particulièrement grave, inhumain et intolérant de juger l’homosexualité comme une maladie spirituelle qui peut être guérie. Il nous semble injuste, cruel et stupide de vouloir leur ôter la possibilité d’une pleine relation affective et sexuelle avec le partenaire qu’ils ont choisi par attirance et par amour, dans une altérité propre à tout individu qui se pose en relation avec les autres. En conséquence de cela, tant le mariage civil qu'une bénédiction à l'église nous semblent légitimes et tout à fait soutenables d'un point e vue théologique.                          
Matteo Silvestrini


[1] Dans la brochure Couples de même sexe, FEPS, 2005, p. 14, on trouve la précision suivante : “En 1973, l’American Psychiatric Association, puis en 1992 seulement, l’OMS ont rayé l’homosexualité de leur liste de maladies.”

[2] Catéchisme de l'église catholique, 2357, Mame/Plon, 1992, p. 480.

[3]Pierre Burgat a fait circuler un document sur internet, sans titre, traitant de l'homosexualité, il y a quelques années. Gérard Pella a publié différentes prise de position contre la décision de la FEPS, dans le site http://www.ler3.ch/ (consulté le 18 novembre 2019). Erich Fuchs, Le désir et la tendresse, Pour une éthique chrétienne de la sexualité, Albin Michel / Labor & Fides, 1999. Pierre Bühler,
«Entre identité et altérité : l’homosexualité d’un point de vue biblique et théologique», in Identité plurielle. Pluralité des identités, Université de Neuchâtel, 2002.

[4] Cf le document de Pierre Burgat et l'article de Gérard Pella, Bible et homosexualité: comment interpréter, http://www.ler3.ch/bible-et-homosexualite-comment-interpreter/,  (consulté le 18 novembre 2019)


[5] Au fond, que la problématique de l'homosexualité soit simplement sexuelle, la citation révélatrice du pasteur Burgat des "magnifiques mots" d'une lettre d'amour, pardon, amitié que le "grand" Augustin a écrit à son ami Severus le prouve aussi : « Toi qui me connais comme je me connais moi-même… parce que tu es un autre moi-même, ou plutôt parce que ton âme et la mienne n’en font qu’une ». Ces mots d’amour ne posent aucun problème au pasteur Burgat, puisque, pour ce que nous en savons, Augustin et Severus n’ont pas couché ensemble.