Rubrique: "Le p'tit paroissien"
"Le p'tit paroissien" est le bulletin trimestriel de la Paroisse de Villeret, dont je suis le pasteur. Je me permettrai parfois de poster quelques réflexions tirées de nos bulletins, ainsi que d'informer sur les activités de la paroisse de Villeret. Voici un tout vieux texte tiré de notre bulletin:
Femmes fatales, filles rebelles,
Une méditation sur les figures féminines du livre des
Juges, inspirée par la lecture du livre de Corinne Lanoire, Femmes
fatales, filles rebelles, Labor et Fides, 2006. Le présent texte est un
résumé de la première de trois prédications faites à Villeret de janvier à mars 2007. La suite sera publiée ultérieurement
1)
Aksa,
la fille rebelle (Juges 1)
La Palestine est en feu, Jérusalem attaquée, les habitats massacrés, les
villes fortifiées sont en ruine, le peuple d’Israël attaque, mais n’arrive
toute fois pas à chasser l’ennemi de son territoire…. Il ne s’agit pas des
derniers faits divers dans le conflit Israëlo-palestinien, mais d’un résumé
concis du premier chapitre du livre des Juges. Ce récit bien musclé, bien
masculin, étalant toute la force de frappe d’un peuple bien déterminé, est
soudainement coupé par l’histoire d’une jeune fille promise comme trophée de
guerre par son père au plus vaillant guerrier. Cette jeune fille, Aksa, femme
objet ou, pire encore, femme trophée, devient par la seule force de son courage
et de sa détermination, la protagoniste d’un petit récit de quelques lignes.
Conquise (c’est le cas de le dire !), par un beau et jeune guerrier, elle
va prendre les devants, elle le séduit afin qu’il soit d’accord de la soutenir
lors d’une requête qu’elle soutiendra à son père. Avec beaucoup de courage elle
se rends chez son père, trouve un moyen pour attirer l’attention de celui-ci et
lui pose sa question. Aksa lui demande de la bénir et de lui donner des
territoires fertiles, avec des eaux d’en haut et des eaux d’en bas (sources et
pluies). Elle avait en effet reçu en cadeau un territoire aride et désertique.
Lorsque le peuple d’Israël a collecté ces récits ( Vème et IVème avant J-Ch) il venait de
rentrer dans sa terre, après presque un siècle d’exile à Babylone. Il se pose
pour lui la question de quelle façon il allait habiter le Pays. Les récits
de guerre proposent une façon masculine d’habiter le Pays : par la guerre,
par la délimitation du territoire, par l’exclusivité de la possession, par
l’exclusion des autres, par le massacre des différents. Les histoires comme
celle d’Aksa proposent d’habiter le Pays par l’envie de vivre dans un
territoire fertile, plus féminin, plus vivant qu’un pays rendu désertique par
la guerre. L’histoire d’Aksa ouvre une brèche où il fait bon de s’engouffrer,
au milieu des palmiers d’une oasis fertile. Cette brèche ouvre au milieu de nos
petitesses, de nos égoïsmes, de nos envies de revanche, de nos envies d’être
mieux lotis que les autres, un espace de partage et de bonheur pour nous et
pour ceux qui nous entourent. L’histoire d’Aksa, la fille promise, nous fait
réfléchir nous aussi : de quelle façon voulons nous habiter ce Pays qu’est
notre vie ?
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